YHWH dit : n’approche pas d’ici. Ôte tes sandales car le lieu où tu te tiens est une terre sainte. Et il ajouta : je suis le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob. Moïse se cacha le visage, car il craignait de regarder Dieu. » Exode 3, 1-6
De nombreuses commentaires juifs et chrétiens se sont interrogés à juste titre sur le fait que Dieu apparaît à Moïse dans des épines. Le buisson épineux se dit ceneh en hébreu, qui a donné son nom à la montagne sainte du Sinaï. Les épines du buisson de la révélation représentant les souffrances du peuple de Dieu, et sans doute la compassion de YHWH pour ses enfants prisonniers de la servitude. Le prophète Isaïe (Is 53) présente le rôle salvateur du Serviteur souffrant qui par le don de lui-même ouvre une brèche dans l’étau du mal omniprésent.
Cette présence de Dieu dans un buisson épineux, symbole de son attention prévenante à la condition humaine souffrante, se retrouve dans un texte du Livre des Juges, 9, 6-15 :
« Un jour, les arbres se mirent en campagne pour se donner un roi et le conscrer par l’onction. Ils dirent à l’olivier : sois notre roi ! L’olivier répondit : faudra-t-il que je renonce à mon huile qui sert à honorer Dieu et les hommes, pour aller me balancer au-dessus des autres arbres ? Alors les arbres dirent au figuier : viens, toi, sois notre roi ! le figuier leur répondit : faudra-t-il que je renonce à la douceur et la saveur de mes fruits pour aller me balancer au-dessus des autres arbres ? Les arbres dirent alors à la vigne : viens, toi, sois notre roi ! La vigne leur répondit : faudra-t-il que je renonce à mon vin qui réjouit Dieu et les hommes, pour aller me balancer au-dessus des autres arbres ? Alors, tous les arbres dirent au buisson d’épines : viens et sois notre roi ! Le buisson d’épines répondit : si c’est de bonne foi que vous me consacrez par l’onction pour être votre roi, venez vous abriter sous mon ombre, sinon, qu’un feu sorte du buisson et dévore jusqu’aux cèdres du Liban ! »
Les arbres représentent les croyants, et l’image biblique récurrente du juste, ami de Dieu, est en effet l’arbre. Dans ce texte, c’est curieusement le buisson d’épines qui l’emporte parmi les autres arbres pour régner sur eux tous. Alors que l’olivier, le figuier et la vigne sont au cœur de l’histoire d’Israël ! Et cela, en écho au buisson du Sinaï, où la souffrance est prise en compte au milieu du feu non destructeur de la Présence, il est donc clair que le règne du divin ne s’évade jamais des réalités terrestres.
C’est le cas de celui que des juifs pratiquants du 1er siècle ont reconnu comme Oint par Dieu, Jésus de Nazareth : après avoir donné à tant d’hommes et de femmes la force de se reconstruire, il a vécu sa passion comme serviteur souffrant, donnant sa vie pour ouvrir une nouvelle voie d’humanité surgie de sa résurrection. Et sa communauté de foi s’est répandue à travers le monde pour annoncer le règne à venir du Dieu lent à la colère et plein d’amour. Pourrait-on oublier le moment révélateur où tout se récapitule, lorsque Jésus reçoit une couronne d’épines, précisément au moment où les soldats romains se moquent de lui en l’appelant « roi des juifs » ?
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
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